Hypnose conversationnelle : un exemple d’Erickson

L’extrait d’un article du Dr Milton Erickson intitulé “L’hypnose profonde et son induction”, 1952

“Les hypnotistes peu expérimentés ont tendance à essayer, au cours de l’induction de la transe, de diriger ou de contôler le comportement du sujet pour qu’il soit conforme à leur conception de la façon dont un sujet “doit” se comporter. Il faut en ce domaine toujours minimiser le rôle de l’hypnotiste et mettre constamment en valeur le rôle du sujet.
On peut citer en exemple un sujet volontaire, qui servit plus tard à  enseigner l’hypnose à  des étudiants en médecine. Après une présentation générale de l’hypnose, elle manifesta le désir d’entrer en transe sur le champ. Je lui suggérai de choisir la chaise et la position qui lui sembleraient les plus confortables. Quand elle se fut installée à  sa convenance, elle déclara qu’elle aimerait bien fumer une cigarette. On lui en donna une aussitôt et elle commença à fumer tranquillement, observant d’un air pensif les volutes de fumée. Sur le ton de la conversation, je lui fis quelques remarques sur le plaisir de fumer et d’observer les volutes de fumée, sur son sentiment de bien-être quand elle portait la cigarette à sa bouche, sur la sensation de satisfaction intérieure qu’elle pouvait éprouver à être complètement absorbée par le fait de fumer agréablement, sans attendre quoi que ce soit de l’extérieur. Puis, je fis quelques remarques d’apparence anodines sur le fait d’inspirer et de souffler, mots que j’énonçais au rythme de sa respiration. J’évoquai aussi la facilité avec laquelle elle pouvait presque automatiquement élever sa cigarette jusqu’à sa bouche, puis abaisser ensuite le bras jusqu’à  l’accoudoir du siège.
Ce remarques étaient également émises au moment où elle faisait le geste correspondant. Bientôt, les mots “inspirer” et “souffler”, “élever” et “abaisser” commencèrent à la conditionner, sans qu’elle s’en rende compte puisque ces suggestions avaient l’apparence d’une conversation ordinaire. De même, je lui donnai des suggestions banales dans lesquelles les mots “dormir”, “endormie” et “sommeil” étaient prononcés en suivant les mouvements de ses paupières.
Avant d’avoir fini sa cigarette, elle était en transe légère. Je lui fis alors la suggestion qu’elle pourrait continuer à prendre plaisir à fumer tout en dormant de plus en plus profondément ; que je m’occuperais de sa cigarette pendant qu’elle serait absorbée de plus en plus totalement dans un profond sommeil ; que, tout en dormant, elle continuerait à avoir les sensations agréables qu’elle avait en fumant. Il s’ensuivit une transe profonde satisfaisante, et je l’entraînai longuement pour lui apprendre à réagir selon ses propres schémas inconscients de fonctionnement.
Par la suite, l’auteur la présenta à maintes reprises à des groupes d’étudiants en médecine pour qu’ils travaillent avec elle comme sujet volontaire. Pour l’essentiel, elle se comportait avec eux comme elle l’avait fait avec l’auteur, mais les étudiants réagissaient de différentes manières à sa requête de fumer une cigarette. Certains la dissuadaient avec tact de remettre ainsi à plus tard l’induction de transe, d’autres se mettaient à fumer avec elle, et d’autres encore attendaient patiemment qu’elle ait fini. Ce n’est qu’après avoir réglé d’une manière ou d’une autre la question de la cigarette qu’ils lui permettaient de s’atteler à sa tâche d’être hypnotisée. Dans tous les cas, le résultat était un échec.

Lors de la dernière réunion avec tous les étudiants qui avaient participé à  ce travail, deux autres étudiants furent introduits séparément pour tenter de l’hypnotiser. L’auteur avait raconté à ces deux étudiants comment il avait utilisé le comportement du sujet, comme nous l’avons décrit ci-dessus. Tous les deux induisirent des transes profondes. Les autres étudiants, en suivant ces exemples, réussirent aussi par la suite.”

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